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PLF 2025 : Quels impacts sur le secteur énergétique ?

Augmentation

Le Projet de Loi de Finances (PLF) pour 2025, présenté en octobre 2024, propose des réformes ambitieuses pour le secteur énergétique afin de réduire le déficit public et renforcer les comptes de l’État, avec une dette publique estimée à 6 % du PIB fin 2024. Les incluent une augmentation des taxes sur l’électricité, un ajustement de la TVA sur l’énergie, une révision du mécanisme de mesures de capacité et l’instauration d’un versement nucléaire universel, qui bien qu’avantageux pour les finances de l’État, pourrait rendre les entreprises énergétiques plus vulnérables aux fluctuations des prix de l’électricité.

  • L’ARENH  cède sa place au versement nucléaire universel

Dès le 31 décembre 2025, l’Accès Régulé à l’Énergie Nucléaire Historique (Arenh) disparaîtra au profit d’un mécanisme baptisé « versement nucléaire universel », conçu pour redistribuer les bénéfices excédentaires de la production nucléaire. Les fournisseurs alternatifs devront ainsi achever leurs dernières demandes sous l’Arenh, après quoi ils devront s’approvisionner via le marché de gros pour répondre à leurs besoins en électricité. Jusqu’ici, l’Arenh garantissait un tarif fixe de 42 €/MWh aux consommateurs, mais limitait également les marges d’EDF, réduisant ses capacités d’investissement dans de nouvelles infrastructures. Dans le cadre du projet de loi de finances 2025, un accord entre EDF et le gouvernement introduit donc ce versement nucléaire universel : un modèle de redistribution des surprofits, où l’État prélèvera entre 50 et 90 % des revenus générés lors des hausses de prix, allégeant ainsi les factures des particuliers et des entreprises.

Ce dispositif soulève néanmoins des critiques, en particulier du secteur industriel, qui redoute une instabilité accrue des prix. Les industries, notamment celles du secteur chimique, appellent à des tarifs stables et demandent une extension des contrats à long terme. Pour consolider les finances publiques, EDF pourrait par ailleurs être soumis à un dividende exceptionnel ou à une taxe spécifique sur ses installations de production.

  • Réforme des capacités et ajustements fiscaux

Dans le cadre de sa révision législative du secteur énergétique, le gouvernement prévoit une transformation du mécanisme de garantie de capacité. Ce dispositif actuel, basé sur l’achat de certificats par les fournisseurs d’énergie, devrait être remplacé en 2026 par une subvention directe, elle-même financée par les fournisseurs. L’objectif est de soutenir les centrales électriques et les solutions de flexibilité nécessaire pour répondre aux pics de demande. En introduisant une redevance proportionnelle à la consommation des clients, estimée entre 2 et 3 €/MWh, l’État souhaite garantir le financement de RTE, le gestionnaire du réseau. RTE se chargera ensuite d’acheter les garanties auprès des producteurs de flexibilité, assurant ainsi la stabilité du réseau. En parallèle, une augmentation de l’accise sur l’électricité est également à l’étude pour février 2025. Ce relèvement fiscal, visant à générer trois milliards d’euros pour l’État, pourrait atteindre jusqu’à 49 €/MWh, bien au-delà des 32 €/MWh initialement anticipés, tout en étant suivi d’une baisse de 9 % des tarifs réglementés de vente d’électricité. Cependant, cette hausse pourrait faire monter la facture des grandes entreprises opérant sur les offres de marché, tandis que les industries électro-intensives bénéficieront d’une exonération jusqu’en 2025 pour préserver leur compétitivité.

Toutefois, cette augmentation de l’accise suscite des débats au sein du gouvernement : tandis qu’Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique, appelle à privilégier les énergies décarbonées, le ministre du Budget, Laurent Saint-Martin, s’oppose à cette différenciation. Cette divergence a conduit la commission des finances de l’Assemblée Nationale à écarter temporairement l’article sur l’accise. Le texte devrait néanmoins être débattu dans sa version initiale, marquant ainsi une étape cruciale pour le secteur énergétique et les objectifs de transition écologique du pays.

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  • Nouveaux enjeux pour les  entreprises

Le projet de loi de finances 2025 envisage de relever la TVA de la partie fixe des abonnements au gaz et à l’électricité à 20 %, contre 5,5 % actuellement, pour se conformer aux normes européennes. Pour les particuliers, cette hausse serait compensée par une baisse de 9 % des tarifs réglementés de vente d’électricité. En revanche, les entreprises devront anticiper des coûts annuels supplémentaires, bien que des mesures compensatoires soient envisagées. Depuis l’annonce du PLF, de nombreuses entreprises manifestent leur inquiétude face à cette révision, qui complique davantage leur planification budgétaire. La fin de l’Arenh, dispositif de stabilisation des coûts, combinée au mécanisme de redistribution des surprofits encore peu précisé, accroît les incertitudes et pourrait les exposer davantage aux variations du marché énergétique.
Ces réformes pourraient également ralentir la transition énergétique des secteurs industriels et tertiaires. En effet, malgré les ambitions du gouvernement en matière de décarbonation, les incohérences fiscales risquent de freiner les investissements vers des solutions durables, rendant l’électrification industrielle et des transports plus difficiles.

Pour faire face à ces évolutions, les entreprises devront adapter leurs stratégies d’approvisionnement énergétique et optimiser leur consommation. Une gestion d’achat d’énergie stable et anticipée pourrait les aider à bénéficier de meilleures conditions, réduire leur exposition aux fluctuations de coûts et préserver leur compétitivité dans un contexte fiscal plus contraignant.